Le harcèlement sexuel :
une dépénalisation qui
fait mauvais genre
Le délit de harcèlement sexuel
n’est plus ; ainsi en a jugé le Conseil constitutionnel dans la décision
QPC n° 2012-240 du 4 mai dernier. Les neuf membres de l’institution de la rue
Montpensier ont estimé que la disposition aux termes de laquelle « le fait
de harceler autrui dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle est
puni d'un an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende » « permet
que le délit de harcèlement sexuel soit punissable sans que les éléments
constitutifs de l'infraction soient suffisamment définis ; [ainsi] ces
dispositions méconnaissent le principe de légalité des délits et des peines et
doivent être déclarées contraires à la Constitution »[1].
Un mot sur l’origine de la
disposition litigieuse : le harcèlement sexuel était réprimé à la fois par
le Code du travail et le Code pénal depuis 1992, sur le fondement d’une loi
modifiée à plusieurs reprises par le législateur dans le but d’en préciser le
régime juridique[2]. L’article L 1153-1 du code du travail, qui demeure
inchangé, dispose ainsi que « les agissements de harcèlement de toute
personne dans le but d’obtenir des faveurs de nature sexuelle à son profit ou
au profit d’un tiers sont interdits ». Les termes ne manquent pas de
généralité, ce en quoi ils ne se distinguent guère des dispositions pénales
aujourd’hui censurées par le Conseil constitutionnel – ce qui constitue sans
doute un premier paradoxe : alors que les dispositions du code pénal sont
aujourd’hui abrogées pour cause d’une imprécision qui les rendraient
inconstitutionnelles, les dispositions jumelles continuent toutefois de
s’appliquer dans le cadre de la relation de travail[3]. Quant aux dispositions pénales relatives au
harcèlement sexuel, créées par les lois du 26 juillet 1992 entrées en vigueur
le 1er mars 1994, elles avaient été amendées à plusieurs reprises et
donc – on peut l’imaginer – (avaient été) réfléchies et longuement débattues au
terme d’un long processus législatif. Tant la loi
n°98-468 du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des
infractions sexuelles ainsi qu’à la protection des mineurs, que la loi de
modernisation sociale du 17 janvier 2002 en avaient ainsi modifié la
formulation… sans soulever, pour cette dernière, aucune remarque du Conseil
constitutionnel[4].
Dans ce contexte, dix ans après,
la décision rendue sur QPC étonne… et il est difficile de voir en elle
« la rançon de toutes ces lois votées dans l’émotion après un fait
divers », comme le prétend pourtant un célèbre observateur du monde juridique[5]. Car la décision du Conseil de prononcer l’abrogation de
l’infraction sans moduler les effets dans le temps, et partant, de légaliser le
harcèlement avec effet rétroactif pour les affaires non encore définitivement
jugées conduit à jeter un doute sérieux sur notre Etat de droit : d’une
part, le signal qu’elle lance aux victimes entache l’office du juge
constitutionnel comme gardien des droits fondamentaux ; d’autre part, le
message qu’elle envoie aux juristes altère la confiance qu’ils pouvaient avoir
mis dans la capacité de la procédure de QPC à renforcer cette mission. A
travers les choix qu’il a effectués, car il s’agit bien d’un choix parmi d’autres possibilités, le
Conseil s’expose à la critique à plusieurs égards : du point de vue du
raisonnement juridique que sa décision révèle et du point de vue du message
politique que sa jurisprudence adresse.
I) Une décision contestable du point de vue du raisonnement juridique
« Le législateur tient de
l'article 34 de la Constitution, ainsi que du principe de légalité des délits
et des peines qui résulte de l'article 8 de la Déclaration des droits de
l'homme et du citoyen de 1789, l'obligation de fixer lui-même le champ
d'application de la loi pénale et de définir les crimes et délits en termes
suffisamment clairs et précis »[6]. Le considérant de principe est classique. Il se pare de
titres de noblesse incontestables et nul défendeur des droits de l’Homme ne
saurait le discuter. Pourtant son utilisation, au cas d’espèce, ne va pas sans
soulever de questions.
Précisons d’emblée un
point : oui, la loi sur le harcèlement était rédigée de façon indigente…
Définir le harcèlement sexuel comme le fait de harceler en vue d’obtenir des
“faveurs” sexuelles, est une démarche pléonastique qui insulte
l’intelligence : une faveur est de l’ordre du consenti, du don, alors que
le harcèlement est une extorsion et une violence. Définir l’infraction en se
plaçant du coté des plaignants et en
recourant à l’euphémisme de « faveurs » au lieu de la définir en se
positionnant du coté des agents et en désignant des « actes abusifs
tendant à des rapports sexuels », en dit par ailleurs long sur la
conception que l’on (ici, le législateur) se fait de la liberté de
détermination sexuelle. Il arrive aussi que certains arrêts utilisent des
euphémismes ou des termes poétiques[7] pour désigner des attitudes inacceptables au regard du
Code pénal, jouant sur le registre de l’ambivalence. Cela étant, s’il était
exigé du législateur qu’il s’exprimât dans un français recherché et approprié,
bon nombre de nos codes législatifs seraient fragilisés[8]... Que la loi soit mal écrite est une chose, qu’elle soit
contraire à la Constitution en est une autre et jamais le Conseil
constitutionnel n’a interprété le principe d’intelligibilité de la loi comme
impliquant une élégance littéraire... Or, admettre que l’incrimination était
rédigée en termes discutables ne permet pas de conclure qu’elle était ipso facto trop imprécise et trop vague.
Plusieurs raisons à cela :
De manière générale, le
maniement, par le juge constitutionnel, de l’imprécision de la loi comme arme
de sa censure n’est pas sans susciter certaines réserves. En effet, au plan
théorique, la notion même d’“imprécision” est, si l’on osait, imprécise tant
elle dépend toute entière de l’interprétation qu’en fait le juge. Est imprécise la notion que l’interprète
qualifie d’imprécise. C’est d’ailleurs pour ce motif que des notions telles
que celle « d’applicabilité directe » de la norme, souvent définies
en référence à sa « clarté » ou sa « précision »[9], sont critiquées : elles révèlent amplement, par
leurs implicites, que la règle directement applicable est celle que le juge
déclare telle[10], sans qu’il soit réellement possible de trouver d’autre
explication pleinement valable que celle fournie par l’acte de volonté du juge[11]. On sait aussi, par ailleurs, combien souvent, cet
argument de l’imprécision est instrumentalisé[12] : le Conseil constitutionnel est bien placé pour le
savoir, qui s’est souvent vu critiqué pour oser censurer le législateur sur le
fondement de normes trop imprécises[13]. Il est d’ailleurs de ce point de vue particulièrement
piquant que ce soit précisément au motif que l’abondance de précision pourrait
rendre l’incrimination inconstitutionnelle que la députée Nadine Morano
convainquait ses collègues de la modifier dans un sens moins précis[14]…. Tout aussi piquante est, de ce point de vue, la décision
de ne pas transmettre de QPC rendue par la Cour de cassation en 2011 sur
l’article 222-33-2 du Code Pénal relative au harcèlement moral, critiquée pour
son défaut de précision, au motif que le Conseil constitutionnel l’avait
déclaré conforme à la Constitution[15]… Où l’on voit que la notion d’imprécision de la norme est
largement sujette à toutes les interprétations…
Mais il faut admettre qu’en
matière pénale, la notion d’imprécision revêt un sens et une fonction qui
justifient potentiellement le rôle que lui fait ici jouer le Conseil
constitutionnel. Ce dernier a en effet souvent rappelé « la nécessité pour
le législateur de définir les infractions en termes suffisamment clairs et
précis », afin notamment « d’exclure l’arbitraire »[16]. Cette expression, classique dans la jurisprudence
constitutionnelle, doit cependant être comprise comme excluant non pas
l’imprécision en tant que telle, mais l’imprécision
en tant qu’elle risque de mener à l’arbitraire. Autrement dit, le principe
de légalité des délits et des peines, invoqué dans la décision, peut bien
s’accommoder parfois d’un certain degré d’imprécision. Ce qui explique qu’on
trouve, y compris en matière pénale, des dispositions imprécises pourtant
validées par le Conseil[17]. Ainsi, en 2004, alors que lui était déférée la loi
portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, il a
considéré comme suffisamment précise la notion de « bande
organisée », en se référant à l’interprétation donnée par la jurisprudence
pénale et aux précisions résultant d’une convention internationale[18]. Un an plus tôt, il avait considéré que le délit de
« racolage public » était une incrimination suffisamment précise,
même lorsqu’il résultait d’une « attitude passive »[19]... Que dire, en outre et sans que la liste ne soit
exhaustive, de l’association de malfaiteurs, de l’exhibition sexuelle, de
l’abus de faiblesse ou encore de l’ensemble des infractions reposant sur
l’impossibilité de justifier de ses ressources… Nombreuses sont ainsi les
infractions susceptibles de poser problème au regard des exigences de clarté et
de précision sans pour autant que leur conformité à la constitution n’ait été discutée…
Le 4 mai dernier, la question
ainsi identifiée était donc de savoir si l’incrimination de harcèlement sexuel
était d’une imprécision telle qu’elle risquait de conduire à des solutions
arbitraires. Or, la solution rendue par le Conseil constitutionnel suscite un
certain nombre d’observations.
Tout d’abord, la notion de
harcèlement, que d’aucuns jugent éminemment imprécise, notamment après que le
législateur en a, en 2002, en effet considérablement allégé la définition peut
bien être lue comme porteuse de sens en elle-même. Rappelons les raisons pour
lesquelles le législateur a procédé de la sorte. C’est en partant du constat de
l’extrême variété ( !) des actes pouvant constituer un harcèlement sexuel,
rendant inutile et restrictive leur description, qu’il a modifié plusieurs fois
les termes du code pénal pour tenter de trouver la définition la plus juste…
et, au fil du temps, brève, voire lapidaire, qui exprime pour l’essentiel
l’idée que le harcèlement sexuel ne se limitait pas, comme pouvaient le laissaient
penser les premières définitions, aux actes d’un supérieur sur son employé mais
pouvait aussi être commis, la jurisprudence le montre, par un collègue ou même
en dehors d’un lien professionnel, par un voisin, un enseignant, un parent. On
peut d’ailleurs noter que, dans le commentaire officiel qu’il publie sur son
site, le Conseil constitutionnel cherche sur ce point à minimiser quelque peu
la portée de sa décision, en laissant entendre qu’elle n’exige pas un retour en
arrière de l’action législative –un retour aux formulations initiales. En
effet, « la définition du délit de harcèlement sexuel n’est pas
subordonnée à l’insertion de précisions relatives à la fois à la nature,
aux modalités et aux circonstances des agissements réprimés ». « Une
[seule] de ces précisions serait nécessaire pour que la définition de ce
délit satisfasse à l’exigence de précision de la loi pénale ».
Le fait que la loi pénale
n’inclue pas elle-même ces éléments permettant de préciser l’incrimination de
harcèlement sexuel est-il de nature à en faire une incrimination menant à
l’arbitraire ? C’est l’argument majeur des opposants à l’incrimination du
harcèlement sexuel. Et il fait mouche dans un pays où une suspicion de viol
peut être ramenée à un banal “troussage de domestique”... et où cette
incrimination est souvent présentée comme l’étendard de travers provenant de la
« puritaine » société américaine : « il faut se
féliciter », notent certains auteurs, « du fait que la société
française, dans le prolongement de l’amour courtois chanté par les troubadours,
conçoit les rapports entre les hommes et les femmes comme une rencontre de deux
libertés et non comme une guerre. Gardons-nous des excès
d’outre-Atlantique »[20]…. Est-ce dire que le
harcèlement serait un tort bénin au pays de la gauloiserie ? Non, bien sur…
convient-il, encore une fois de le rappeler ? le harcèlement est aux
antipodes de la séduction, et il appartient précisément au juge du fond d’effectuer
cette distinction.
Or, en français, la définition du harcèlement, ne fait
aucun doute. Il faut entendre l’indignation d’un des plus éminents linguistes
français face à la motivation de la décision du Conseil Constitutionnel[21] : « harceler »
a pour étymologie la herse, un instrument de torture, et partage son origine
avec le verbe « harasser », épuiser, mettre à bout. C’est un lexique
de prédation qui est ainsi mobilisé. Selon le dictionnaire,
« harceler » est le fait de « soumettre sans répit à de petites
attaques réitérées, à de rapides assauts incessants ». Quant au
harcèlement sexuel, il est défini à la fois par des directives européennes, en
matière de droit du travail, et par la jurisprudence pénale : c’est, aux
termes des directives 2002/73/CE et 2006/54/CE[22], « la situation dans laquelle un comportement non
désiré à connotation sexuelle, s'exprimant physiquement, verbalement ou non
verbalement, survient avec pour objet ou pour effet de porter atteinte à la
dignité d'une personne et, en particulier de créer un environnement intimidant,
hostile, dégradant, humiliant ou offensant ». Et la jurisprudence pénale
concourt également à la définition du terme : ainsi, selon le Tribunal
correctionnel de Villefranche-sur-Saône[23] cherchant à définir la frontière au-delà de laquelle un
comportement est sexuellement harcelant : « Une ligne de départ peut
s'établir si l'on retient que le harcèlement sexuel est un comportement lié au
sexe de la victime, non désiré et subi par elle, et ayant pour elle des effets
notamment dégradants ou humiliants ». Ou encore, selon le Tribunal
correctionnel de Narbonne[24] : « les actes de nature sexuelle constitués par
le contact physique des mains de M. Y... sur les fesses, puis sur les seins de
Mme X... et ce dans le but d'assouvir ou d'accentuer le désir sexuel du prévenu
(...) sont constitutifs du délit de harcèlement sexuel ». Cela montre
également qu’à trop refuser l’application de l’incrimination d’agression
sexuelle au sens de l’article 222-27 du Code pénal dans des hypothèses qui s’en
rapprochent pourtant, une certaine forme d’édulcoration des comportements
attentatoires au libre choix de son partenaire sexuel est à l’œuvre.
La jurisprudence relative au harcèlement sexuel dans les
relations de travail met justement en valeur le pragmatisme raisonné du juge.
On y découvre qu'une définition large du harcèlement n'a pas entraîné de
reconnaissance systématique et exponentielle de celui-ci. En effet, un
garde-fou de taille est dressé puisque, depuis des arrêts rendus le 24
septembre 2008[25], la
Cour de cassation opère un contrôle de la qualification du harcèlement au
travail et des modalités de l'appréciation portée par les juges du fond sur des
éléments de fait et précise aux juges du fond les règles relatives à la
recherche de la preuve. La jurisprudence fourmille d’illustrations de la
finesse de l’examen auquel se livrent les juges : pour être retenue, la
volonté du harceleur d'obtenir des faveurs sexuelles doit être clairement
exprimée. Tel n'est pas le cas par exemple, lorsque un salarié envoie
« pour s'amuser», à ses collaborateurs des photos érotiques accompagnées d'un
texte sur le port du string lors des réunions d'équipe[26]. Les gestes déplacés ou
propos inconvenants qui ne tendent pas à l’obtention de faveurs sexuelles ne
relèvent pas de la qualification de harcèlement. En revanche, dès lors que le
salarié incriminé a eu à l'égard de plusieurs collègues, et en dépit de leurs
remarques et protestations, des attitudes et des propos déplacés dans le but
manifeste d'obtenir des faveurs de nature sexuelle, le harcèlement sexuel est
caractérisé, peu importe que l’employeur ait ou non toléré les faits en leur
temps[27].
Passe
encore que le Conseil ait décidé d’affermir sa jurisprudence et de sanctionner
l’impéritie du législateur en retenant une conception étroite du droit pénal.
Si telle était sa ligne jurisprudentielle pour l’avenir, ceci contribuerait à
relever le niveau d’exigence à l’égard de bon nombre de normes sécuritaires
adoptées ces dernières années. Mais un doute s’instille face aux choix concrets
effectués par le Conseil dans la présente affaire : ne pas avoir recours à
une modulation dans le temps des effets de sa décision traduit un choix de
politique jurisprudentielle qui n’est pas sans susciter d’interrogations, au
regard de la question d’espèce bien sûr, mais aussi, plus largement, au regard
de l’Etat de droit que l’institution du Conseil constitutionnel en général et la
procédure de QPC en particulier sont supposées incarner.
II) Une décision contestable du point de vue politique
Belle
journée en vérité pour les harceleurs de tout poil que celle du 4 mai
2012 : leur horizon s’est éclairci de manière notable. Sans compter qu’en
toute hypothèse, la sociologie criminelle nous renseigne désormais très
clairement sur l’extrême difficulté que constitue pour les victimes d’abus et
violences sexuelles le fait de porter plainte. Dans sa récente étude sur le
viol, Véronique Le Goaziou établit ce constat avec limpidité : la
criminalité sexuelle est sous-appréhendée par le système judiciaire car les
victimes, dans de très larges proportions, ne portent pas plainte[28].
Il faut alors prendre la mesure du poids politique du message ici envoyé par le
Conseil constitutionnel : en ne modulant pas dans le temps les effets de
sa décision, en considérant que « l'abrogation de l'article 222-33 du code
pénal prend effet à compter de la publication de la présente décision ; qu'elle
est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette
date », c’est un message d’indifférence voire de mépris qu’il envoie à
toutes les victimes qui avaient initié des procédures judiciaires.
1) Une politique jurisprudentielle qui jette le trouble
La plus grande cause d’étonnement, voire d’irritation, due
à cette décision réside certainement dans le refus du Conseil de procéder à la
modulation dans le temps des effets de la déclaration d’inconstitutionnalité.
La conséquence est nette, et sans appel, dans tous les sens du terme: le délit
étant abrogé, toutes les procédures pénales où l’action publique a été mise en
mouvement aboutiront à une décision mettant hors de cause la personne
soupçonnée : les non lieux et relaxes vont s'enchaîner en cascade. Seules
demeurent possibles les poursuites et les condamnations pour les cas de
harcèlement sexuel commis dans le cadre des relations de travail (même si le
sort de la disposition sociale est subordonné à une future QPC). Pour le reste,
dans la fonction publique, à l’Université, dans le cadre de la vie privée,
l’incrimination est tombée et les poursuites avec.
Il était pourtant parfaitement
permis et aisé d’éviter ce gâchis. L’article 62 alinéa 2 de la Constitution offre
désormais expressément au Conseil Constitutionnel la faculté de moduler de
multiples manières les effets de ses décisions “QPC” dans le temps. Comme
beaucoup l’ont dit, il pouvait décider que l’abrogation ne prendra effet qu’à
compter « d’une date ultérieure fixée par cette décision ». Il n’a
d’ailleurs pas hésité à le faire à propos des lois sur la garde à vue,
reportant de douze mois « la date de cette abrogation
afin de permettre au législateur de remédier à cette
inconstitutionnalité »[29]. Mais, il peut aussi –comme il l’a fait dès sa première
décision QPC[30]- demander « aux juridictions de surseoir à
statuer » jusqu’à une date qu’il fixe « dans les instances dont
l’issue dépend de l’application des dispositions déclarées
inconstitutionnelles » et ce, « afin de préserver l’effet utile de la
présente décision à la solution des instances actuellement en cours ».
Enfin, le Conseil peut inviter le législateur à « prévoir une application
des nouvelles dispositions à ces instances en cours à la date de la présente
décision ».
Certes, comme de nombreux
commentateurs ont pu le faire valoir[31], cette modulation dans le
temps peut sembler heurter de front le principe de « rétroactivité in
mitius », qui commande l’application de la loi pénale plus douce aux
procédures en cours.
On retrouve ici une figure
classique du contentieux constitutionnel : le conflit entre normes de même
rang constitutionnel. A cette figure classique correspond une solution
classique : la conciliation par laquelle il appartient au Conseil de faire
prévaloir une des deux normes sur l’autre. Il a ici choisi de faire prévaloir
le principe de rétroactivité in mitius sur
la possibilité offerte par la Constitution de moduler dans le temps les effets
de sa décision. La solution inverse était pourtant tout aussi possible, parmi
les différentes possibilités que la Constitution lui ouvre.
Mais ici, foin de toutes ces
options. C’est froidement et sèchement qu’il déclare l’inconstitutionnalité de
l’incrimination : « Considérant que l'abrogation de l'article
222-33 du code pénal prend effet à compter de la publication de la présente
décision ; qu'elle est applicable à toutes les affaires non jugées
définitivement à cette date »[32].
Le contraste entre les possibilités qui s’offraient au juge constitutionnel en
la matière et son choix de n’en utiliser aucune mérite d’autant plus d’être
souligné que, quand bien même le législateur agirait
promptement pour combler la lacune créée par la QPC ici commentée – ce à quoi
le nouveau gouvernement semble s’engager-, il n’est pas certain qu’il soit
possible aux victimes qui se sont vues couper l’herbe sous le pied de reprendre
les poursuites désormais interrompues, et ce, eu égard au principe de
non-rétroactivité de la loi pénale. La non-rétroactivité de la loi pénale plus
sévère pourrait bien en effet les empêcher de renouveler leur action sous
l’empire d’une hypothétique nouvelle loi.
Certes, une solution pourrait
être imaginée : le législateur pourrait être tenté de jouer les
contorsionnistes, comme il l’a fait pour la loi sur l’inceste[33], pour que les termes de
son nouveau texte précisent sans durcir. Mais, ici, l’abrogation immédiate de
l’incrimination de harcèlement a une portée plus importante que celle des
incriminations de viols, agressions et atteintes sexuelles à caractère
incestueux. Tandis que les décisions des 16 septembre 2011 et 17 février 2012
s’opposaient à l’usage du terme d’« inceste » sans toutefois faire
obstacle à des poursuites sur le fondement d’agressions sexuelles par des
adultes ayant autorité sur mineurs, la décision du 4 mai 2012, elle, a vocation
à s’appliquer rétroactivement aux faits commis antérieurement car l'abrogation
de la loi pénale éteint les poursuites engagées[34]. Si l'annulation de la
qualification d'« inceste » par le Conseil constitutionnel pose
problème, elle n'équivaut pas à la perte des incriminations elles-mêmes. De ce
point de vue, la portée de la décision du 4 mai qui anéantit l'incrimination de
harcèlement sexuel est autrement plus virulente. Ce qui reste en vigueur : ce
sont notamment les agressions sexuelles,
le harcèlement moral ou les violences. Mais le temps, l'énergie, l'argent et
les éléments récoltés pour prouver le harcèlement, eux, sont perdus. Ce gâchis
doit être dénoncé. En outre, l’apparente pureté technique de la solution doit
être évaluée au regard du choix du Conseil en d’autres domaines, tels la
législation économique, d’écarter le
principe de rétroactivité in mitius[35].
Au-delà, on
peut également s’interroger sur ce qu’un tel choix révèle de l’idée que le juge
constitutionnel se fait de son office tel que redéfini suite à l’entrée en
vigueur de la révision constitutionnelle de 2008. Le contrôle effectué dans le
cadre de la QPC est-il, en effet, un contrôle concret ou toujours un contrôle
abstrait, bien qu’a posteriori ?
La présente décision nous paraît indiquer que seul le moment de l’intervention
du contrôle a changé, mais non sa nature. C’est bien en effet toujours de
contrôle abstrait qu’il s’agit lorsque le juge se prononce d’une part sur l’incrimination
telle qu’elle résulte de la loi et sans se préoccuper de la portée qui lui est
effectivement conférée par le juge, et d’autre part, sans se soucier des
conséquences de sa décision. On peut à cet égard contraster sur ce dernier
point la démarche du Conseil constitutionnel français et celle du Bundesverfassungsgericht allemand. Ce
dernier, qui jouit désormais d’une forte tradition de contrôle concret a
posteriori des normes, y compris pénales, s’autorise à considérer que si une
loi de droit pénal substantiel est contraire à la Loi fondamentale, il peut y avoir
lieu de reporter son abrogation à une date ultérieure, en laissant au
législateur le temps et l’espace nécessaire pour légiférer[36]. Or, avec la QPC
‘Harcèlement sexuel’, les conséquences sont bien plus abruptes : le
Conseil force, en fait, la main du législateur qui doit voter une nouvelle loi
de façon urgente – d’autant plus particulière que le Conseil a rendu cette
décision dans un contexte politique, et parlementaire, spécifique lié au calendrier
de l’élection présidentielle.
2) Une jurisprudence politique qui se dévoile
Le plus grave tient en fait à la
question de la responsabilité politique du Conseil constitutionnel au regard de
cette décision. Car bien sûr, le Conseil aurait pu juger tout autrement – c’est
ce qu’on a essayé d’établir ci-dessus. Mais précisément, il ne l’a pas
fait ; plus exactement il a choisi
de ne pas le faire. Le Conseil aurait-il coupablement relâché son attention
vis-à-vis des pratiques plaçant les femmes « dans une situation
d'exclusion et d'infériorité manifestement incompatible avec les principes
constitutionnels de liberté et d'égalité »[37] ?
Point –mais la cause des femmes est bonne fille, elle se prête à toutes les
interprétations. Or il est de la plus haute importance de prêter attention aux
conditions particulières de cette espèce, pour éclairer ce qui relève bel et
bien d’un choix des « sages ». Car les faits à l’origine de la QPC
n’étaient pas anodins : c’est une affaire mettant en cause M. Gérard
Ducray, ancien député, ancien secrétaire d’Etat, dont la condamnation confirmée
en appel avait trait au harcèlement de trois fonctionnaires territoriales de
Villefranche, qui a été le terreau de la QPC. Autrement dit, il s’agit ici
d’une affaire de harcèlement par les élus/élites politiques. Il faut faire à ce
sujet trois observations au moins.
On peut d’abord souligner que la
décision QPC en question lance un message de surdité et d’aveuglement vis-à-vis
de la problématique de la collusion entre politique et abus en matière sexuelle
qui est d’autant plus triste qu’elle fut rendue à la date anniversaire du
« scandale DSK », lequel avait
fourni une occasion historique d’y réfléchir et de la disséquer. En effet,
c’est tout ce que « l’affaire DSK » a suscité qui compte le
plus : la révélation, à cette occasion, de la dimension structurelle de
l’abus sexuel dans nos communautés politiques[38], ainsi que l’incapacité du système (politique, mais aussi
juridique) à décrire les choses en ces termes et donc, à les sanctionner[39]. Il est dès lors particulièrement consternant que le
Conseil constitutionnel se soit montré aveugle ou indifférent à la portée d’une
invalidation d’une des dispositions emblématiques de la lutte contre les
violences sexuelles à l’occasion d’une affaire mettant en cause, précisément,
un élu. Cela revient à dire que non seulement nos démocraties sont largement
construites sur le fait que la possession du pouvoir, y compris politique,
autorise les violences sexuelles, mais encore à interroger leur degré de tolérance
vis-à-vis de mécanismes et procédures qui menaceraient cet état de collusion.
En ce sens, la décision commentée
prête le flanc à la pire des suspicions pesant sur le « système »
dont l’affaire DSK avait permis la formulation –à savoir : celle d’une collusion
généralisée entre les élites pour maintenir leurs positions hégémoniques et
défendre collectivement et solidairement leur impunité généralisée[40]. Piètre image pour le Conseil constitutionnel que celle
d’une instance de protection des élites. La suspicion se fait d’autant plus
forte qu’il n’aura fallu que quelques heures pour que soient mis en évidence
les liens d'accointance sinon d’amitié entre Gérard Ducray, l’homme par qui la
QPC arrivait, et plusieurs membres du Conseil constitutionnel : « Jacques Barrot, […] était secrétaire d'Etat au logement dans le même gouvernement que M. Ducray (…). Hubert
Haenel, qui a lui aussi siégé, était de son côté conseiller pour les
questions judiciaires à l'Elysée de 1975 à 1977 »[alors que M. Ducray
était secrétaire d’Etat de 1974 à 1976, sous la présidence de M. Valéry Giscard
d’Estaing et dans le gouvernement de Jacques Chirac –tous deux membres de droit
(bien qu’ils n’aient pas siégé ici) du Conseil constitutionnel… On peut
d’ailleurs s’interroger, à ce propos, sur le point de savoir s’il n’y avait pas
ici matière à déport ou récusation. On lit en effet à l’article 4 du règlement
intérieur du Conseil : « Tout
membre du Conseil constitutionnel qui estime devoir s'abstenir de siéger en
informe le président ». Ce déport ne semble pas avoir été évoqué. Et quand bien même
les « sages » seraient convaincus de respecter le standard européen
de l’apparence d’impartialité, une faculté de récusation est possible, faculté
dont on peut regretter qu’elle n’ait pas été utilisée en l’espèce : en
effet, toujours aux termes du règlement intérieur, « Une partie ou son représentant muni à cette fin d'un
pouvoir spécial peut demander la récusation d'un membre du Conseil
constitutionnel par un écrit spécialement motivé accompagné des pièces propres
à la justifier. La demande n'est recevable que si elle est enregistrée au
secrétariat général du Conseil constitutionnel avant la date fixée pour la
réception des premières observations. La demande est communiquée au membre du
Conseil constitutionnel qui en fait l'objet. Ce dernier fait connaître s'il
acquiesce à la récusation. Dans le cas contraire, la demande est examinée sans
la participation de celui des membres dont la récusation est demandée. ».
A l'heure où la question connexe de savoir si un ancien Président de la
République, redevenant avocat d'affaires, pourra siéger au Conseil
constitutionnel en raison d'éventuels conflits d'intérêts, il est sans doute
bon d’alerter les lecteurs sur l'intérêt légitime pour les parties de penser à
cette question de la récusation. Sur des sujets aussi sensibles, cette question
est pertinente et incontournable. L’issue est pour le moins incertaine, tout du
moins en droit interne, mais peut soulever au moment de la décision un débat -
juridique, médiatiquement fort - voire fragiliser une décision contestable. Nul
doute que cette question de la récusation mérite d’avantage d’attention qu’elle
n’en suscite – et peut-être spécifiquement dans le cadre du contentieux QPC.
En
d’autres termes, la présente QPC ne fait que (re)poser diverses questions
relatives à l’institution du Conseil constitutionnel. Elle compte en effet
parmi ces décisions qui soulignent certains aspects incongrus de l’institution
même, ab initio dans la Vème République naissante et a fortiori du
fait des évolutions considérables de son rôle depuis 1958[41], qui ne font que rendre plus
problématique encore sa forte dépendance vis-à-vis du pouvoir politique – au
moins du point de vue de sa composition. Rappelons que lors des débats de 2008,
il avait été question de modifier son nom pour donner les apparences de la
cohérence à cette institution en l’appelant « Cour
constitutionnelle »[42] - une hypothèse qui a
finalement été abandonnée. Mais plus que sur le nom de l’institution, c’est
probablement sur les règles de composition et de désignation des membres qu’il
convenait de revenir. Il n’en fut, pour ainsi dire[43], rien. De sorte que l’ambiguïté
(droit ? politique ?) demeure ; en fait, elle s’aggrave[44] car si on n’a pas changé son
nom, on a réellement modifié son rôle en lui permettant d’exercer désormais un
contrôle a posteriori susceptible de conduire à modifications de
l’ordonnancement juridique … Un rôle qui se rapproche de celui des
(authentiques) cours constitutionnelles, alors même que sa composition maintient
le Conseil dans la famille des institutions politiques non juridictionnelles.
Dès lors, la QPC ‘Harcèlement Sexuel’ permet de comprendre que la consécration
de la procédure de QPC n’a pas eu pour effet de substituer une compétence
juridictionnelle à une compétence politique, mais d’instaurer une situation de
cumul entre une compétence juridictionnelle classique et une compétence
politique quasi-législative. La superposition de ces compétences fait du
Conseil un monstre institutionnel et peut conduire à l’abus – ou y contribuer
en couvrant des abus.
Il faut prendre ici la mesure de
l’importance de cette décision. Elle est inquiétante pour le Conseil, les
droits fondamentaux et le paradigme de l’Etat de droit – on l’a dit. Elle est
aussi dramatique parce qu’elle révèle ce qu’il y a de structurel dans la
manière dont nos communautés politiques et juridiques sont construites à partir
d'un assujettissement des femmes, principales victimes du harcèlement sexuel.
Il y a 40 ans, Simone de Beauvoir écrivait à propos de l’avortement :
« Pourquoi l’idée de cette libération rencontre-t-elle une pareille
opposition ? Selon moi, il y a une raison, une seule, mais qui pèse
lourd : la loi sur l’avortement est une pièce essentielle du système que
la société a mis en place pour opprimer les femmes »[45].De la même manière, les atermoiements auxquels on assiste
depuis une vingtaine d'années au sujet du harcèlement sexuel, impliquant donc
ici pour l'épisode en cours jusqu'au Conseil constitutionnel, témoignent de la
profonde incrustation des mécanismes de l'oppression sexuelle. Le droit, dans
tous ses rouages – y compris les plus officiels et les plus officiellement
vertueux – peut les véhiculer.
On relève en dernier lieu et
comme pour illustrer l'antagonisme qui se joue dans cette affaire, la plainte
déposée contre le Conseil constitutionnel par des associations féministes pour trouble à l'ordre public
et mise en danger délibérée des victimes du harcèlement sexuel. Si l'action est
symbolique, elle a toutefois le mérite d'attirer l'attention sur la violence
faite aux victimes de harcèlement. On sait en effet combien ces situations
pendantes causent aux personnes en attente d'un soulagement les plus vives
angoisses. L'ordre public qui est ici invoqué tend à renverser les responsabilités.
De la même manière qu'il arrive au Conseil constitutionnel d'en appeler à la
responsabilité du législateur pour qu'il mette fin à un trouble dans l'ordre
juridique, ce recours en appelle au Conseil constitutionnel pour qu'il mette
fin au désordre qu'il a lui-même causé ; susceptible d'engager une forme de
responsabilité pénale. Ici, le fauteur de trouble désigné par la société civile
est le Conseil constitutionnel, le renvoyant à sa fonction revendiquée de
défenseur des droits fondamentaux.
Stéphanie Hennette-Vauchez, Juliette Gaté, Marie-Laure Gely, Céline Ingelaere, Charlotte Girard Diane Roman, Claire Saas, Camille Viennot
[2] Loi
n°92-1179 du 2 novembre 1992,Loi n°2001-397 du 9 mai
2001 ; Loi n°2002-73 du 17 janvier 2002 et Loi n°2010-769 du 9 juillet 2010.
[3]
Peut-être que cet élément constitue en fait un risque plus qu’un paradoxe. Il
faut en effet noter que quelques jours à peine à près la décision QPC ici
commentée, une autre QPC a été transmise au sujet de l’incrimination, par le
Code du travail, du harcèlement moral (voir : http://www.lemonde.fr/societe/article/2012/05/10/apres-le-harcelement-sexuel-le-harcelement-moral-suspendu-a-une-qpc_1699660_3224.html).
Ce n’est probablement qu’une question de jours, ou de semaines, pour que les
dispositions relatives au harcèlement sexuel dans le Code du travail se voient,
elles aussi, visées par une QPC. En tout état de
cause, on attend désormais avec impatience l’argumentation du Conseil qui
saisira sans nul doute cette nouvelle occasion soit pour préciser la
spécificité de l’incrimination sexuelle par rapport à l’incrimination morale,
soit pour étendre sa jurisprudence à toutes les hypothèses d’imprécision de la
loi pénale. Dans le second cas, on pourra répondre que la protection des
opprimés connaît des ratés en France et que précisément la domination telle
qu’elle est traduite dans les mots de la loi se décline aisément d’une
oppression à l’autre.
[4] CC,
2001-455DC, 12 janvier 2002, Cons. 77 à 90. Le harcèlement sexuel y est
essentiellement visé au titre de l’aménagement de la charge de la preuve.
[5] D.
Salas, Libération, 22 mai 2012.
[6] v. aussi C.C., 2011-204 QPC, 9 décembre 2011, Journal
officiel du 10 décembre 2011, p. 20991, texte n°94, cons. 3
[7]
Voir la référence à « des mains qui vagabondent
dans le cou et sur le bas de seins ». Versailles, 15ème
ch., 2 novembre 2011, n° reg 10/01066 (nous soulignons).
[8]
Pour un exemple de critique de l’absence d’intelligibilité loi, voir C.C., 5
mai 1998, n° 98-399 DC, cons. 7 : « qu'il résulte de l'article 34 de
la Constitution, ainsi que du principe de la légalité des délits et des peines
posé par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la
nécessité pour le législateur de fixer lui-même le champ d'application de la
loi pénale, de définir les crimes et délits en termes suffisamment clairs et
précis pour permettre la détermination des auteurs d'infractions et d'exclure
l'arbitraire dans le prononcé des peines, et de fixer dans les mêmes conditions
le champ d'application des immunités qu'il instaure ; qu'en soumettant à
l'appréciation du ministre de l'intérieur la "vocation humanitaire"
des associations, notion dont la définition n'a été précisée par aucune loi et
de la reconnaissance de laquelle peut résulter le bénéfice de l'immunité pénale
en cause, la disposition critiquée fait dépendre le champ d'application de la
loi pénale de décisions administratives ; que, dès lors, nonobstant le pouvoir
du juge pénal d'apprécier, conformément aux dispositions de l'article 111-5 du
code pénal, la légalité de tout acte administratif, ladite disposition porte
atteinte au principe de légalité des délits et des peines et méconnaît
l'étendue de la compétence que le législateur tient de l'article 34 de la
Constitution ».
[9] V.
par exemple F. Sudre, Droit international
et européen des droits de l’Homme, 7è ed., PUF, 2005.
[10] Voir
D. Alland : « L’applicabilité directe du
droit international du point de vue de l’office du juge : des habits neufs
pour une veille dame ? », Revue générale de droit international
public 1998, p. 208 ou encore C. Sciotti Lam, L'applicabilité des
traités internationaux relatifs aux droits de l’Homme en droit interne,
Bruxelles, Bruylant, 2004, p. 401 : « l’affirmation selon laquelle un
traité est toujours directement applicable n’a pas de véritable
signification ».
[11] Ce que révèlent les récentes évolutions de la jurisprudence
administrative et judiciaire en matière de conventions internationales
consacrant des droits sociaux: v. en dernier lieu, CE, Ass., 16 avril 2012,
GISTI et FAPIL, n° 322326, par lequel le Conseil considère que l'effet direct
d'une stipulation doit être reconnu par le juge administratif « lorsque, eu égard à l'intention exprimée des parties et à l'économie générale du traité invoqué, ainsi
qu'à son contenu et à ses termes, elle n'a pas pour objet
exclusif de régir les relations entre États et ne requiert l'intervention d'aucun acte complémentaire pour produire
des effets à l'égard des particuliers ».
[12] Il faut lire Véronique Champeil-Desplats, Les principes fondamentaux reconnus par les
lois de la république. Principes constitutionnel et justification dans les
discours juridiques, Economica, 2001.
[13] Emblématique de ce point de vue sont les positions qui ont
trouvé à s’exprimer suite à la très polémique décision du 13 août 1993 Maîtrise
de l’immigration –et notamment, celle du Premier ministre de l’époque, M.
Edouard Balladur : « depuis que le Conseil a décidé d’étendre son
contrôle au respect du Préambule de la Constitution, cette institution est
conduite à contrôler la conformité de la loi au regard de principes généraux
plus philosophiques et politiques que juridiques, quelquefois contradictoires,
et de surcroît, conçus à des époques bien différentes de la nôtre ;
certains pensent même qu’il lui est arrivé de les créer lui-même ».
[15]
C.C., 12 février 2002, n° 2001-455 DC, Loi
de modernisation sociale.
[16] C.C., 19-20 janvier 1981, n°80-127 DC, , Sécurité et Liberté, cons. 7.
[17] Voir
ainsi le raisonnement in C.C., 11 octobre 1984, n°84-181 DC, Entreprises de presse, cons. 20.
[18]
C.C., 2 mars 2004, n°2004-492 DC, Evolutions de la criminalité, cons. 13 et 14. V. sur ce point
l’analyse faite par B. de Lamy, Cahiers
du Conseil constitutionnel, n° 26, 2009 (Dossier : La Constitution et le
droit pénal), qui relève que le Conseil n'hésite pas à recourir, dans l'examen
de lois pénales, aux réserves d'interprétation (voir par ex. C.C., 16 juin
1999, n° 99-411 DC, Sécurité routière
cons. 17 ; C.C., 12 janvier 2002, n°2001-455DC, Modernisation sociale, cons. 82 et 83 ; C.C., 23 mars 2003,
n°2003-467DC, Sécurité Intérieure,
cons. 73 à 75 ; C.C., 27 juillet 2006, n° 2006-540 DC, Droit d’auteur, cons. 62). Le même
raisonnement, poursuit l’auteur, se retrouve dans la jurisprudence de la
CourEDH, qui n'hésite pas à intégrer l'oeuvre jurisprudentielle pour juger de
la précision suffisante des termes législatifs (voir par ex.Cour EDH, 30 mars
2004, Radio France/France).
[19]
C.C., 13 mars 2003, n°2003-467 DC, Sécurité Intérieure, cons. 62, où il est
jugé que la disposition législative insérant dans le code pénal un
article 225-10-1 ainsi rédigé : « Le fait, par tout moyen, y compris
par une attitude même passive, de procéder publiquement au racolage d'autrui en
vue de l'inciter à des relations sexuelles en échange d'une rémunération ou d'une
promesse de rémunération est puni de deux mois d'emprisonnement et de 3 750
euros d'amende » ne méconnaît pas le principe de légalité des délits et
des peines, dès lors que les dispositions critiquées « définissent en
termes clairs et précis le délit de racolage public ».
[20] B.
Py, De la prohibition de l'abus de pouvoir à la répression d'une ambiance ?, Le
droit pénal et les relations de travail, Rev. Droit du Travail, 2011, p. 348,
L’auteur met néanmoins en garde : « la vigilance doit s’imposer dans
la mesure où l’existence de sentiments sincères n’exclut pas systématiquement
le harcèlement sexuel ».
[21] A. Rey, interviewé sur France inter
le 27 mai : http://www.franceinter.fr/emission-3d-le-journal-le-harcelement-sexuel-et-le-mot-de-l-annee,
rappelle l’étymologie conjointe des mots « harasser » et
« harcèlement » considère qu’il s’agit d’une question de « lexicographie
élémentaire ».
[22] Directive 2002/73/CE du Parlement Européen et
du Conseil du 23 septembre 2002 modifiant la directive 76/207/CEE du Conseil
relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes
et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la
promotion professionnelles, et les conditions de travail ; et Directive
2006/54/CE du Parlement Européen et du Conseil du 5 juillet 2006 relative à la
mise en œuvre du principe de l'égalité des chances et de l'égalité de
traitement entre hommes et femmes en matière d'emploi et de travail.
[23]
Trib. Corr. Villefranche sur Saône, 29 juin 2010, cité
par M. Baldeck, « Une définition rénovée pour un droit plus
effectif », Revue de droit du
travail, 2011, pp. 368 et s. (l’auteure, cependant, dans son article,
soutient la thèse de la contrariété de l’infraction au principe de légalité des
délits et des peines).
[24] Trib. Corr. Narbonne, 7 mars 2008, cité par M.
Baldeck, Ibid.
[25] Cass. soc., 24 sept. 2008, n° 06-45.747, n° 06-45.-794, n°
06-45.579, n°06-46.517 : JurisData n° 2008-045106 à n° 2008-045109 ;
note C. Leborgne Ingelaere, JCP S,
2008, 1537,
[26] Cass. soc., 14 nov. 2007, n° 06-45.263.
[27] Cass. Soc. 1er déc. 2011, n° 10-18.920.
[28] V. Le Goaziou, Le
viol, aspects sociologiques d’un crime, La Documentation Française, 2011.
[29]
C.C., 2010-14/22 QPC, 30 juillet 2010. Certes, il
s’agit d’une loi de procédure dont l’application dans le temps est régie par
d’autres principes que ceux régissant l’application de la loi pénale de fond.
[30] C.C., QPC du 28 mai 2010 Consort L. (Cristallisation
des pensions)
[31]Olivier Bachelet, « Inconstitutionnalité, pour défaut de précision, du délit de
harcèlement sexuel » in Lettre
« Actualités Droits-Libertés » du CREDOF, 9 mai 2012.
[32] §7.
[33] Loi n°2010-121 du 8 février
2010 tendant à inscrire l'inceste commis sur les mineurs dans le code pénal et
à améliorer la détection et la prise en charge des victimes d'actes incestueux.
[34] Conformément à l’article 6 du Code de procédure
pénale.
[35]
C.C., 3 décembre 2010, n°2010-74 QPC, M. Jean-Marc P. et autres
(Rétroactivité de la loi pénale plus douce).
[36] Dans
une décision du 4 mai 2011 relative à la rétention de sûreté (Bundesverfassungsgericht,
2 BvR 2365/09, 2 BvR 740/10, 2 BvR 2333/08, 2 BvR 1152/10, 2 BvR 571/10), le
Tribunal fédéral constitutionnel allemand, suite à une décision d'inconventionnalité
rendue par la Cour européenne des droits de l'Homme, reconnaît à son tour
l'inconstitutionnalité de la mesure. Il l'assortit non seulement de
préconisations à l'endroit du législateur qui devra reformuler la mesure, mais
aussi d'une modulation de l'effet de sa décision dans le temps, puisqu'il
autorise le maintien de la mesure inconstitutionnelle pendant encore deux ans ;
tout ceci sans qu'aucun juriste n'y trouve à redire. Même si cette espèce n'est
pas tout à fait analogue à celle du harcèlement sexuel qui nous occupe puisque
la mesure en question n'est pénale qu'au regard de la définition qu'en donne la
Cour européenne des droits de l'Homme, elle a néanmoins le mérite de démontrer
que le juge constitutionnel allemand, lui, n'hésite pas à prolonger la durée de
vigueur d'un texte plus sévère. En d'autres termes, les règles d'application de
la loi pénale dans le temps souffrent quelques assouplissements dès lors qu'un
intérêt supérieur apprécié par le juge constitutionnel l'exige. On pense
notamment à l'ordre public et concrètement à la difficulté pratique de libérer
immédiatement plusieurs centaines de personnes en cas d'inconstitutionnalité
immédiate. C’est le vide juridique (rechtliches
Vakuum) craint par le Bundesverfassungsgericht.
[37] C.C.,
7 octobre 2010, n°2010-613 DC, Dissimulation
du visage dans l’espace public.
[38] Voir les nombreux témoignages de femmes politiques
confirmant machisme et sexisme comme violences ordinaires du monde politique,
dans les jours suivant l’affaire DSK ; et aussi S. Hennette-Vauchez, Ruth
Rubio Marin, « DSK, Berlusconi : les liens entre pouvoir et violences
sexuelles », Libération, 18 mai 2011 (en ligne : http://www.liberation.fr/politiques/01012337961-dsk-berlusconi-les-liens-entre-pouvoir-et-violences-sexuelles).
[39] Ainsi, c’est la crédibilité de la plaignante en général (et
notamment, la crédibilité de sa parole relative à son histoire migratoire) qui
a causé l’abandon des poursuites pénales dans l’affaire du Sofitel, confirmant
là une des antiennes de la critique féministe du droit qui, en matière de
violences sexuelles précisément, montre combien pèse sur la victime une
présomption difficilement réfragable de non sincérité ; voir là-dessus les
textes et analyses classiques réunis dans des ouvrages tels que : S.
Millns, J. Bridgeman, Feminist
Perspectives on Law, London, Sweet&Maxwell, 1998
[40] On ne saurait, pour des raisons de volume ( !)
rappeler en note de bas de page le système de solidarité particulièrement
proéminent et sonore qui se met en place à chaque inculpation d’une homme
politique sur des questions de mœurs sexuelles –quelle que soient leur gravité.
On se bornera ici à renvoyer, pour des commentaires de ces interventions, à C.
Delphy, dir., Un troussage de domestique, Syllepses, 2011.
[41] Sur
lesquelles on peut notamment lire un travail de référence malheureusement non
disponible en français : A. Stone, The Birth of Judicial Politics in
France, Oxford University Press, 1992.
[42] Voir R. Badinter, « Une
longue marche 'du Conseil à la Cour constitutionnelle' », in Cahiers
du Conseil constitutionnel n° 25 (Dossier : 50ème anniversaire), août 2009
: http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/nouveaux-cahiers-du-conseil/cahier-n-25/une-longue-marche-du-conseil-a-la-cour-constitutionnelle.51690.html
[43]
Ainsi, depuis la révision constitutionnelle de 2008, la procédure d’audition
par des commissions parlementaires prévue à l’article 13 est applicable aux
nominations au Conseil constitutionnel.
[44] Voir
en ce sens P. Wachsmann, « Sur la composition du Conseil
constitutionnel », Jus Politicum,
n°5 : http://www.juspoliticum.com/Sur-la-composition-du-Conseil.html
[45] S. de Beauvoir, Préface, in Choisir, Avortement :
une loi en procès. Sténotypie intégrale des débats du tribunal de Bobigny,
Gallimard NRF, 1973, p. 12.
Décision alternative
Le 4 mai dernier, le Conseil
constitutionnel a prononcé l’abrogation du délit de harcèlement sexuel en
raison de l’imprécision qui caractériserait cette incrimination pénale.
La dépénalisation de ce délit
symptomatique des revendications féministes, à tous égards, fait mauvais genre.
Bien sûr, de prime abord, elle correspond aux canons (de son) genre. Le Conseil
déclare inconstitutionnelle une disposition que même une association comme
l’AVCF jugeait telle, car trop « imprécise » ; il ne module pas
dans le temps les effets de son jugement d’inconstitutionnalité, mais convainc
très largement qu’il ne pouvait faire autrement –non-rétroactivité de la loi
pénale oblige. Mais on peut porter un autre regard, critique, sur la décision
–sur ce qu’elle dit et sur ce qu’elle ne
dit pas. Il est intéressant en effet de considérer que, loin d’être
opposés, la parole et le silence se constituent l’un l’autre de sorte que ce
qui est maintenu silencieux est en réalité partie intégrante de ce qui est dit.
Cela permet en toute hypothèse de jeter une autre lumière sur cette décision
QPC du 4 mai et de comprendre que :
-
Dire que l’incrimination est imprécise, c’est nécessairement
nier l’idée que la notion de harcèlement sexuel a un sens (ce qu’apprécieront
celles et ceux qui en ont été victimes) ;
-
Dire que le Conseil ne pouvait juger autrement, c’est
nécessairement nier la responsabilité du juge, en revenant à la fiction de la
puissance « en quelque sorte nulle » d’un juge sans choix, qui ne
ferait que mécaniquement appliquer la règle de droit.
Or précisément, sur ces
points, nous pensons que les silences de la décision du 4 mai sont plus
intéressants que ce qui y figure explicitement ; nous pensons que le
raisonnement juridique pouvait être autre. S’inspirant des exemples fournis par
des universitaires canadiennes (Tribunal des femmes) ou
britanniques (Feminist judgments project), et reprenant ici la maxime d’Oscar
Wilde selon laquelle « notre seul devoir à l’égard de l’histoire est de la
réécrire »,nous proposons ici un exemple de décision alternative, montrant
qu’un autre droit est (aurait été) possible.
Décision alternative REGINE : M. Gérard D. [Définition du délit de harcèlement sexuel]
Vu la
Constitution ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code pénal ;
Vu la loi n° 92-684 du 22 juillet 1992 portant réforme des dispositions du code pénal relatives à la répression des crimes et délits contre les personnes ;
Vu la loi n° 98-468 du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs ;
Vu la loi no 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale ;
Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ;
Vu les observations produites …
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code pénal ;
Vu la loi n° 92-684 du 22 juillet 1992 portant réforme des dispositions du code pénal relatives à la répression des crimes et délits contre les personnes ;
Vu la loi n° 98-468 du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs ;
Vu la loi no 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale ;
Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ;
Vu les observations produites …
Vu les
pièces produites et jointes au dossier ;
les avocats ayant été entendus
les avocats ayant été entendus
La
rapporteure ayant été entendue ;
1.
Considérant qu'aux termes de l'article 222-33 du code pénal « Le fait de
harceler autrui dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle est puni
d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende » ;
2. Considérant que, selon le requérant, en punissant « le fait de harceler autrui dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle » sans définir précisément les éléments constitutifs de ce délit, la disposition contestée méconnaît le principe de légalité des délits et des peines ainsi que les principes de clarté et de précision de la loi, de prévisibilité juridique et de sécurité juridique ;
2. Considérant que, selon le requérant, en punissant « le fait de harceler autrui dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle » sans définir précisément les éléments constitutifs de ce délit, la disposition contestée méconnaît le principe de légalité des délits et des peines ainsi que les principes de clarté et de précision de la loi, de prévisibilité juridique et de sécurité juridique ;
3. Considérant
qu'aux termes de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du
citoyen de 1789 : « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas
à autrui : ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes
que celles qui assurent aux autres membres de la Société la jouissance de ces
mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi » ; qu'aux
termes de son article 5 : « La loi n'a le droit de défendre que les actions
nuisibles à la société. Tout ce qui n'est pas défendu par la loi ne peut être
empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu'elle n'ordonne pas » ;
qu'enfin, aux termes du troisième alinéa du Préambule de la Constitution de
1946 : « La loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à
ceux de l'homme » ;
4. Considérant que le harcèlement sexuel constitue une forme de violence que le législateur a pu à bon droit choisir de réprimer ; qu’il touche par ailleurs très majoritairement les femmes ; qu’il repose en toute hypothèse sur des stéréotypes de genre liés à la présomption de disponibilité sexuelle des victimes ; que de tels stéréotypes véhiculent l’idée d’une forte inégalité entre les genres et ont pour effet de placer les femmes dans une situation d'exclusion et d'infériorité manifestement incompatible avec les principes constitutionnels de liberté et d'égalité ; que dès lors, l’incrimination contestée a bien pour objet de mettre en œuvre l’exigence constitutionnelle d’égalité entre les sexes
4. Considérant que le harcèlement sexuel constitue une forme de violence que le législateur a pu à bon droit choisir de réprimer ; qu’il touche par ailleurs très majoritairement les femmes ; qu’il repose en toute hypothèse sur des stéréotypes de genre liés à la présomption de disponibilité sexuelle des victimes ; que de tels stéréotypes véhiculent l’idée d’une forte inégalité entre les genres et ont pour effet de placer les femmes dans une situation d'exclusion et d'infériorité manifestement incompatible avec les principes constitutionnels de liberté et d'égalité ; que dès lors, l’incrimination contestée a bien pour objet de mettre en œuvre l’exigence constitutionnelle d’égalité entre les sexes
5.
Considérant que le législateur tient de l'article 34 de la Constitution, ainsi
que du principe de légalité des délits et des peines qui résulte de l'article 8
de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, l'obligation de
fixer lui-même le champ d'application de la loi pénale et de définir les crimes
et délits en termes suffisamment clairs et précis ;
6.
Considérant que l’article 222-33 du Code pénal a été modifié par les lois n°
92-684 du 22 juillet 1992 portant réforme des dispositions du code pénal
relatives à la répression des crimes et délits contre les personnes, n° 98-468
du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions
sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs et n° 2002-73 du 17 janvier 2002
de modernisation sociale ; Qu’il est également réprimé depuis 1992 dans le Code
du travail à l’article L1153-1 ; Que la notion de
« harcèlement » a été reprise pour définir le harcèlement moral à
l’article 222-33-2 du Code pénal par la Loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de
modernisation sociale et le harcèlement au sein du couple par la loi n°
2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux
femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières
sur les enfants ; Que la jurisprudence dégagée par les juridictions
pénales a apporté les précisions complémentaires utiles pour caractériser cette
infraction, notamment quant à la définition de la notion de « faveurs
sexuelles » ;
Que
l'article 179 de la loi du 17 janvier 2002 susvisée a modifié la définition du
délit de harcèlement sexuel en conférant à l'article 222-33 du code pénal la
rédaction contestée ; Que par le retrait de la précision, par la loi du 17
janvier 2002, selon laquelle l’obtention de ces faveurs devait être réalisée
par le biais d’ordres, menaces, contraintes ou pressions graves, le législateur
a seulement entendu prendre en considération, sans restriction, l’ensemble des
modalités possibles par lesquelles l’auteur de l’infraction pouvait tenter
d’obtenir ces faveurs ;
Qu'enfin, la Directive 2002/73/CE du Parlement Européen et du Conseil du 23 septembre
2002 modifiant la directive 76/207/CEE du Conseil relative à la mise en oeuvre
du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui
concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles,
et les conditions de travail et la Directive 2006/54/CE du Parlement Européen
et du Conseil du 5 juillet 2006 relative à la mise en oeuvre du principe de
l'égalité des chances et de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en
matière d'emploi et de travail définissent le harcèlement comme « la
situation dans laquelle un comportement non désiré à connotation sexuelle,
s'exprimant physiquement, verbalement ou non verbalement, survient avec pour
objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité d'une personne et, en
particulier de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant
ou offensant »
7. Considérant, dans ces conditions, que le législateur a rédigé l’infraction en des termes suffisamment clairs et précis pour respecter le principe de légalité et que ces constations montrent que la notion de harcèlement en particulier n’est ni obscure, ni ambiguë.
8. Considérant
qu'il résulte de ce qui précède que l'article 222-33 du code pénal permet la
mise en œuvre des articles 4 et 5 de la Déclaration et le principe d’égalité
entre femmes et hommes sans méconnaitre le principe de légalité des délits et
des peines et doivent être déclarées conformes à la Constitution
D É C I D E :
Article 1er.- L'article 222-33 du code pénal est conforme à la Constitution.
D É C I D E :
Article 1er.- L'article 222-33 du code pénal est conforme à la Constitution.
Savez-vous si une action mettant en cause le non respect de l'impartialité et éventuellement de la discrimination associée est prévue devant la CEDH (articles 6§1 / 14) ou faudrait il se contenter d'imaginer l'arrêt de la cedh?
RépondreSupprimerLaurence
BONJOUR, SOS/ J AVALE DU KAKA, LE MALADE INTRODUIT DU KAKA DANS MES POUMONS. JE NE VEUX PAS DE KAKA SUR LES PIEDS. ENLEVEZ D URGENCE LE KAKA DE MON DOS ET LE KAKA DE MES MAINS. JE SUIS TORTUREE, LE CON ESTROPIE MON SYSTEME NERVEUX, J AI MAL PARTOUT. ENLEVEZ D URGENCE LES PASSEMENTS DE KAKA SUR LE VAGIN. J ETOUFFE, JE NE PEUX PAS RESPIRER. JE NE VEUX PAS DE KAKA SUR LE VENTRE, CESSEZ D URGENCE LA TORTURE. LE CON ME TORTURE EN FAISANT "PIPICH3 AVEC SON VAGIN ET ME FAIT KAKA DANS LES POUMONS. ENLEVEZ LE KAKA DE MON CUL, JE SUIS VIOLEE ET TORTUREE. J AI DEMANDE A CE QU ON ENLEVE LE KAKA DE MON VENTRE, J AI ENVIE DE VOMIR, ET D ARRETER LA TORTURE AVEC L IDIOTE QUI FAIT "PIPICH". ENLEVEZ LA BOUILLIE DE KAKA DE MON VENTRE.
RépondreSupprimerBONJOUR, URGENT; JE SUIS TORTUREE ET VIOLEE PAR UNE PUTE MALADE MENTALE AVEC DU HARCELEMENT "SEXUEL", LA SALOPE NE VEUT PAS ENLEVER S MAIN EMBOUIE DE KAKA DE MES SEINS, DE MON DOS ET DE MON VAGIN ET ME TRIPOTE DE FORCE LE CUL. JE NE PEUX PAS RESPIRER, ENLEVEZ SVP LE KAKA QUI COLLE SUR MES SEINS, ET FAITTES CESSER LES TRIPOTEMENTS SUR MON VENTRE, J AI MAL PARTOUT. JE SUIS DE PLUS HARCELEE PAR DES PUTES MALADES MENTALES AVEC DES BRUITS DE CLOAQUE, ELLE REPETENT "pIPICH" "KARLSKACK" ET "PIPITRIE" OU "PSISITRIE" DANS LES TRANSPORTS TOUTES LES é SECONDES (UNE MALADIE MENTALE SENILE MANIAQUE). IL FAUT ECOUTER CA TOUS LES JOURS. PRIERE DE ME DEBARRASSER DES PUTES MALADES ET CON QUI PUENT, QUI VEULENT ME FORCER A AVALER DE LA DROGUE EN ME DISANT QUE L'OPIUM SERAIT "BON POUR LA SANTE" DES FOLLES MA HARCELENT AVEC DES DELIRES SUR LES HANDICAPES EN CROYANT QUE JE NE SAIS PAS LIRE OU ECRIRE: ELLES VEULENT ETRE PAYEES POUR M AIDER A TENIR MON CRAYON. 5C EST POUR QUE LES CHAUMEURS SOIENT CONTENTS?)
RépondreSupprimerMERCI DE CESSER LA TORTURE. JE SUIS HARCELEE PAR DES PUTES MALADES MENTALES QUI RACONTENT ENSUITE QUE JE SERAIS ANALPHABETE, UNE PROSTITUEE, ET UNE DROGUEE, SINON UNE HANDICAPPE MENTALE: LE BUT ETANT DE ME VIOLER ET DE ME DROGUER;
J APPELLE SOS, SVP, POUR QUE LE MALADE QUI PUE ENLEVE SA MAIN DE KAKA DE MON DOS, ET CESSE DE ME VIOLER AVEC DU KAKA SUR LE VAGIN
MERCI DE CESSER LA TORTURE. JE SUIS HARCELEE PAR DES PUTES MALADES MENTALES QUI RACONTENT ENSUITE QUE JE SERAIS ANALPHABETE, UNE PROSTITUEE, ET UNE DROGUEE, SINON UNE HANDICAPPE MENTALE: LE BUT ETANT DE ME VIOLER ET DE ME DROGUER;
J APPELLE SOS, SVP, POUR QUE LE MALADE QUI PUE ENLEVE SA MAIN DE KAKA DE MON DOS, ET CESSE DE ME VIOLER AVEC DU KAKA SUR LE VAGIN
JE SUIS TORTUREE PAR UNE PUTE QUI SE PREND POUR UNE "PSYCHOLOGUE" ET QUI INSISTE POUR ME FAIRE "ACCEPTER" DU HARCELEMENT "SEXUEL" JE LUI AI REPETE SANS CESSE QUE JE NE VEUX PAS DE HARCELEMENT, ELLE REPOND AVEC DES BRUITS DE SOUPIRS DE VAGIN ET ME DEMANDE POURQUOI JE NE VEUX PAS BAISER OU PREND DES AIRS DE "JUGE" ET ME RACONTE QUE JE SERAIS D' "ACCORD" POUR FAIRE LE TROTTOIR. LA PUTE VEUT ME DROGUER ET M ESTROPIE LA SANTE. ELLE VEUT ME MARIER DE FORCE AVEC UN MALADE MENTAL QUI PUE, ET QUI ENSUITE ME TORTURE EN FOUTANT DE LA BOUILLIE DE MERDE SUR LE VAGIN, OU EN M OBLIGEANT A ME FAIRE TOUCHER LE CUL. LES PUTES PUANTES NE VOULANT PAS COMPRENDRE, J APPELLE AU SECOURS POUR STOPPER LES HARCELEMENTS, AVEC LESQUELS LES PUTES ME BOUSILLENT LA SANTE ET ME FONT PERDRE MON TEMPS ET MON ARGENT
SOS URGENT: ENLEVEZ SVP LA BOUILLIE DE MERDE DE MON VAGIN, DE MON CUL ET DE MES SEINS, J AI MAL PARTOUT ET NE PEUX PAS RESPIRER. CESSER SVP LA TORTURE
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